Nos ancêtres : Tartinés de poudre d'os ou plutôt... poudre de plomb ?

Aujourd'hui c'est simple.
Besoin d'un rouge à lèvres, d'un fard à paupières ou d'un fond de teint miracle ?...On va s'en acheter un à proximité sans se poser de questions. Certaines grandes enseignes, spécialisées en maquillage, nous offrent même un choix tellement incroyable que notre seule limite n'est souvent que le porte-monnaie.
Ces auxiliaires à la beauté font partie de notre normalité. Mais... Qu'en était-il pour nos ancêtres ?
Car...
En Égypte ancienne, dans la cour de Louis XIV ou chez les Romains, nos ancêtres aussi se maquillaient... et pas qu’un peu !
(... et pas que les femmes ;) )
Alors... Quels étaient leurs secrets beauté ?
L'histoire haute en couleur du maquillage à travers les siècles
Le maquillage n'est pas seulement une mode récente, ni une question de féminité moderne. En réalité, nos ancêtres, hommes et femmes, se tartinaient déjà la figure bien avant que nous ne découvrions le mascara waterproof.
Oui, même votre arrière-arrière-grand-père, qui ne l'avouerait probablement jamais, a peut-être un jour porté de la poudre blanche sur son visage.
À travers les époques, le maquillage a reflété non seulement le statut social, mais aussi les aspirations esthétiques, religieuses et parfois politiques. Petit survol de cette aventure colorée...
1 - L'Égypte antique : le khôl et les artisans sacrés
Nos premiers ancêtres à avoir adopté le maquillage de façon systématique étaient les Égyptiens.
Il y a environ 4 000 ans, hommes et femmes se tartinaient généreusement les yeux de khôl, une poudre noire à base de galène, pour protéger leurs yeux du soleil, des infections... et des mauvais esprits.
Les paupières soulignées de noir intense, le maquillage n’était pas seulement esthétique, mais était également symbolique : il protégeait les vivants comme les morts.

Qui fabriquait le maquillage ?
Les cosmétiques égyptiens étaient préparés par des artisans spécialisés, qui travaillaient sous la protection de la déesse Hathor, associée à la beauté et à l’amour.
Ces artisans étaient très respectés dans la société égyptienne, car leur savoir-faire était à la fois cosmétique et médicinal.
Les compositions du maquillage étaient destinées à protéger la peau du soleil intense et des maladies.
Anecdote

La pharaonne Cléopâtre est souvent citée comme l’une des premières femmes à avoir poussé l’art du maquillage à son apogée.
Elle utilisait du khôl, bien sûr, mais aussi des rouges à lèvres faits de carmin, un pigment extrait des cochenilles écrasées (Insectes dont on tirait une couleur rouge écarlate, le carmin), mélangé à de la cire d’abeille pour une meilleure tenue.
(Source : Les Secrets de beauté de l’Égypte ancienne de Marc Gabolde).
Anecdote

Le pharaon Ramsès II (XIIIe siècle av. J.-C.) était un grand adepte du maquillage.
Des recherches archéologiques ont révélé des traces de maquillage autour de ses yeux, des siècles après sa mort !
(Source : La Beauté égyptienne de Florence Maruéjol).
2 - L’Empire romain : ... Vous prendrez bien un peu de plomb ?
À Rome, le maquillage devient un marqueur social, notamment pour les femmes de la haute société.
Les produits phares ? Une poudre blanche à base de plomb, toxique certes, mais qui donnait un teint d'une pâleur jugée noble.
Les joues étaient rougies avec du cinabre, un pigment rouge tiré du mercure.
Les romains utilisaient aussi des fards pour masquer les veines apparentes (les teints translucides étaient alors à la mode !).

Plomb blanc sous forme de comprimés moulés, autrefois utilisé comme cosmétique dans la Grèce antique
Les professionnels du maquillage
Les cosmétiers, ou coiffeurs-maquilleurs, étaient des esclaves ou des artisans, employés par les riches familles romaines pour préparer et appliquer les cosmétiques.
Certains étaient si talentueux qu’ils devenaient des stars au sein des grandes familles.
Leur travail consistait à préparer des mélanges en utilisant des ingrédients rares, comme des fleurs, des racines, et même des substances animales.
Anecdote

L’impératrice Poppée, épouse de Néron, utilisait des cosmétiques d'origine lointaine.
On raconte qu’elle aimait tant les produits exotiques qu’elle importait des fards d'Égypte et de l’huile d'argan du Maroc.
(Source : Beauté dans la Rome antique de Pascal Bordas).
Anecdote

L'impératrice Poppée (toujours elle), aurait été obsédée par son apparence. Elle se maquillait avec des mélanges improbables et aurait même pris des bains au lait d’ânesse pour préserver la jeunesse de sa peau. Elle aurait utilisé 500 ânesses pour ses bains quotidiens !
(Source : Poppée et Néron : Vie privée des grands romains de Pierre Grimal).
3 - Le Moyen Âge : entre poudre et alchimie
Pendant longtemps, l’Église a tenté de bannir le maquillage, considérant que se farder était synonyme de vanité et d’immoralité.
Les femmes de haute société, cependant, continuaient de s’éclaircir la peau avec des poudres blanchissantes.
Eh oui, parce qu’un teint pâle signifiait que vous passiez votre temps à l'intérieur, loin des travaux des champs.
... Il fallait bien montrer qu’on était noble.
En revanche, trop se maquiller pouvait vous coller une réputation diabolique. (Ceci dit, il est vrai que certaines recettes de maquillage relevaient plus de l’alchimie que de la cosmétique !)

A cette époque, les créateurs de maquillage étaient souvent des herboristes ou des guérisseurs.
Ils préparaient des cosmétiques à base de plantes médicinales, mêlant remèdes et soins de beauté.
Certains monastères fabriquaient aussi des onguents à base d'herbes, et certaines de ces recettes ont traversé les siècles.
Légende

On raconte que la reine Isabeau de Bavière, épouse de Charles VI, était une adepte du maquillage, mais qu’elle le faisait en cachette pour éviter les reproches de l’Église.
Ses produits étaient fabriqués par un alchimiste de la cour, qui mêlait cosmétiques et potions.
L’histoire reste floue, mais son obsession pour le teint parfait aurait marqué les chroniqueurs de l’époque.
Représentation d'Isabeau de Bavière accompagnée de ses dames d'honneur datant de la fin du XVIIe siècle ou du début du XVIIIe siècle. Dessin de François Roger de Gaignières (1642-1715)
4 - La Renaissance : ... Vous prendrez bien un peu d'os ?
Le maquillage fait son grand retour à la Renaissance, notamment à la cour de France.
Les hommes et les femmes, toujours en quête de perfection, appliquent des quantités massives de poudre de riz pour blanchir leur peau.
On mélangeait de la poudre d’os ou de la de la poudre de Céruse vénitienne (qui contenait du plomb) avec des parfums pour une odeur agréable. Les sourcils étaient rasés pour agrandir le front et re-dessinés finement à l’encre.
Certains redessinaient également leurs veines à l’encre bleue.
Pourquoi ? Parce que la peau translucide était signe de noblesse.
Le rouge à lèvres, appelé alors fard à lèvres, devient également populaire.

Les professionnels du maquillage
C’est à cette époque que les premiers parfumeurs-cosmétiers apparaissent, un peu comme les ancêtres de nos maquilleurs professionnels.
Ces artistes de la beauté, souvent des hommes, étaient spécialisés dans les fards, les poudres et les parfums.
À la cour de France, des artisans comme Pierre Prévost sont devenus célèbres pour leurs mélanges de poudre de riz parfumée, qu’ils vendaient à prix d’or aux dames de la cour
Anecdote

La céruse a également été accusée de la mort d'une mondaine londonienne du XVIIIe siècle, Maria Coventy, comtesse de Coventry, en 1760. Coventry avait été une utilisatrice fréquente de céruse et on pense qu'elle est morte d'un empoisonnement au plomb à l'âge de 27 ans à la suite de son utilisation fidèle du produit cosmétique. Le grand public la surnommait « Mort par vanité ».
(Source : La Renaissance et la beauté de Patrice Deparpe).
Anecdote

La reine Élisabeth Ire d'Angleterre est connue pour avoir utilisé une poudre blanche appelée "Venetian ceruse", qui contenait du plomb, pour obtenir un teint pâle. Malheureusement, cette habitude lui aurait causé de graves problèmes de peau.
(Source : Beauté et pouvoir : cosmétiques et politique en Angleterre de Judith Craig).
5 - L'époque baroque et Louis XIV : Entre nez poudré et mouches !
Sous Louis XIV, le maquillage devient presque une obligation sociale.
Hommes et femmes de la cour rivalisent de créativité : poudre blanche, perruques immenses, et joues rouge carmin. Messieurs aussi s’y mettent !
Hommes et femmes portaient fièrement de petites mouches.
Ces petits morceaux de velours noirs, étaient placés sur le visage pour signifier un langage codé : près de la bouche pour séduire, sur le front pour la majesté.
Les lèvres et les joues étaient rehaussées de fard rouge vif.
Louis XIV lui-même, pourtant surnommé le "Roi Soleil", aimait se poudrer de blanc le visage.

Les créateurs de maquillage
Des parfumeurs-maquilleurs, comme Jean-Louis Fargeon, célèbre pour avoir été le fournisseur officiel de Marie-Antoinette, créaient des cosmétiques luxueux.
Il développait des poudres de riz parfumées et des fards à lèvres naturels pour la reine et ses dames d’honneur.
Légende

On raconte que Louis XIV aimait tellement le maquillage qu'il aurait décrété un jour qu'aucun membre de sa cour ne pouvait se présenter sans être poudré et bien fardé. Fake news royale ou non, ce n'est certainement pas loin de la vérité tant l’apparence comptait à Versailles.
Anecdote

Marie-Antoinette elle-même utilisait des poudres parfumées, fabriquées spécialement pour elle, qui contenaient des extraits de violette et de rose. Elle suivait de près la mode cosmétique et dépensait des fortunes en crèmes et lotions.
(Source : Marie-Antoinette et la mode de Caroline Weber).
6 - Le XIXe siècle, les débuts de la cosmétique moderne : vive la simplicité ! (ou presque)
Le XIXe siècle voit la naissance des premières marques de cosmétiques industrielles.
L’accent est mis sur la simplicité et la nature.
On trouve du maquillage plus léger, à base de produits naturels comme la poudre de riz.
Des maisons de cosmétiques comme Guerlain, fondée en 1828, révolutionnent le maquillage avec leurs créations luxueuses

Les grands noms du maquillage
C’est à cette époque que les premiers entrepreneurs du maquillage apparaissent.
Eugène Rimmel (fondateur de la maison Rimmel) invente le premier mascara, tandis que Madame Rachel en France ouvre un institut où elle propose des soins de beauté et du maquillage à ses clientes... aristocrates
Anecdote

L'impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, aurait relancé la mode du maquillage léger, mais sophistiqué, pour correspondre à l'élégance de l'époque. Elle aurait possédé une collection impressionnante de poudres et fards fabriqués spécialement pour elle à Paris.
(Source : Eugénie, Impératrice et son style d'Emilie de Villeroy).
Anecdote

Le maquillage a continué d’évoluer à grande vitesse avec des personnages comme Sarah Bernhardt.
L'actrice légendaire, au tournant du XXe siècle, popularise l'utilisation de produits comme le fard gras pour des retouches rapides sur scène.
(Source : Le siècle des fards de Jean-Pierre Moulin).
Vos ancêtres, nez poudré, pro du khôl ou fan de rouge à lèvres ?
Finalement, le maquillage n’a jamais été qu’une simple question de beauté : c’était aussi une affaire de traditions, de statut social et même parfois de rébellion !
Alors, si vous voulez savoir si votre ancêtre préférait le khôl égyptien ou la poudre de riz du XVIIIe siècle, il est peut-être temps de faire retracer l’histoire de votre famille. En resituant vos aïeuls selon les époques, vous en saurez plus sur leurs habitudes.
Qui sait, vous pourriez découvrir des secrets bien gardés derrière... quelques couches de fard !
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