Saviez-vous que certains de vos ancêtres ont peut-être épousé… leurs cousins ?

Cousins et cœurs mêlés : l'art du mariage consanguin chez nos ancêtres
Les unions entre membres d’une même famille, bien qu'elles fassent parfois frémir aujourd’hui, étaient autrefois assez courantes.
Les raisons allaient de la nécessité de préserver des alliances politiques, au maintien de la richesse dans certaines familles, surtout chez les nobles et les rois, mais pas que. En effet, même les classes moyennes et le monde paysan encourageaient ces mariages, notamment pour garder des terres dans la famille.
Mais jusqu’où pouvait-on aller en matière de consanguinité ?
Qui devait demander une dispense ?
Et comment cette procédure se déroulait-elle ?
Ce voyage à travers l’histoire de nos ancêtres dévoile les méandres du mariage consanguin et vous plonge dans quelques lois et anecdotes.
L’Antiquité : mariage de sang, mariage sacré

Dans l'Antiquité, surtout chez les pharaons d'Égypte, les mariages entre frères et sœurs n'étaient pas seulement autorisés, mais encouragés pour préserver la lignée divine.
Anecdote : Cléopâtre et son frère Ptolémée
Cléopâtre, la célèbre reine d'Égypte, a épousé non pas un, mais deux de ses frères, Ptolémée XIII et Ptolémée XIV. Ces mariages, bien qu'étranges pour nous, étaient considérés comme normaux à l'époque. En Égyptienne pragmatique, Cléopâtre finit par écarter ses frères pour régner seule, mais l’ironie est que pour maintenir la pureté de son sang, il fallait d’abord se marier en famille !
(Source : Histoire romaine de Plutarque).
Anecdote : L'énigme de l'Inca
Chez les Incas, le mariage entre frère et sœur n'était pas rare dans les familles royales. L’empereur Atahualpa, par exemple, a épousé sa sœur cadette pour renforcer la pureté divine de leur dynastie. C’était une manière de maintenir la lignée intacte, car les Incas croyaient que leur empereur était un descendant direct du dieu soleil. Ironie du sort, cette consanguinité divine n’a pas empêché Atahualpa de se faire capturer par Pizarro !
(Source : Les Incas de Garcilaso de la Vega).
Moyen Âge : l’Église dicte ses règles

Au Moyen Âge, la consanguinité était surveillée de près par l’Église catholique.
Les mariages entre cousins étaient limités et nécessitaient des dispenses au-delà du 4e degré de parenté
(l’équivalent des arrière-arrière-grands-parents).
Procédures
- Les dispenses pouvaient être demandées par l'intermédiaire d'un évêque, et elles étaient souvent accordées pour des raisons politiques ou économiques.
- Des registres étaient tenus pour documenter les mariages et les dispenses, ce qui a permis de suivre les pratiques de consanguinité.
Anecdote : Charlemagne et l’inceste avorté
Charlemagne, roi des Francs, fut confronté à une situation où son propre fils Pépin, surnommé le Bossu, se rapprocha dangereusement de l’une de ses cousines. Cependant, l'Église s'en mêla et décida que ce mariage était non seulement non autorisé, mais carrément incestueux. Charlemagne, pragmatique, fit exiler son fils, un geste qui ne manque pas d'ironie pour un roi qui aurait eu des liens consanguins avec de nombreuses princesses d'Europe !
(Source : Vita Karoli Magni de Einhard).
Anecdote : Les rois d'Angleterre en quête de dispenses
Henri VIII d'Angleterre est probablement l'exemple le plus célèbre de roi ayant cherché à obtenir une dispense pour épouser sa belle-sœur, Catherine d'Aragon. Le pape Jules II accorda cette dispense, mais l’ironie est que des années plus tard, Henri chercha à la faire annuler pour se débarrasser de Catherine. L’Église, qui avait d'abord facilité leur union, devint l’obstacle majeur à son divorce !
(Source : Six Wives of Henry VIII par Alison Weir).
Renaissance : l'âge des dispenses papales

Durant la Renaissance, la consanguinité restait très surveillée.
Toutefois, avec la montée des mariages politiques, surtout chez les familles royales, les dispenses papales devenaient monnaie courante.
Il était courant de voir des mariages entre cousins proches dans la noblesse européenne.
Anecdote : Les Habsbourg et la « mâchoire de Habsbourg »
Les Habsbourg sont probablement l’exemple le plus célèbre de dynastie consanguine. Leurs mariages fréquents entre cousins ont conduit à des caractéristiques physiques distinctes, comme la célèbre « mâchoire de Habsbourg », une malformation de la mâchoire inférieure. Charles II d'Espagne, dernier des Habsbourg, en était l'exemple ultime : il souffrait de nombreuses maladies dues à des générations de mariages entre proches parents.
(Source : Charles II: The Last of the Spanish Habsburgs par John Lynch).
Anecdote : François Ier et ses mariages de convenance
François Ier, roi de France, a souvent vu ses enfants contracter des unions avec des cousins pour renforcer des alliances européennes. Marguerite de Valois, sœur de François Ier, a failli épouser Charles V, empereur du Saint-Empire romain germanique, son cousin. Ces alliances arrangées tournaient parfois au ridicule quand il fallait jongler avec les degrés de parenté et obtenir les précieuses dispenses papales.
(Source : François Ier, roi de France par Jean-Pierre Babelon).
Époque moderne (XVIe - fin XVIIIe siècle) : le poids de la consanguinité dans les mariages royaux

Jusqu’au XIXe siècle, la noblesse et la royauté continuaient à pratiquer les mariages consanguins pour préserver leur patrimoine et renforcer les alliances politiques.
Chez nos ancêtres de classe moyenne, le mariage entre proches parents était également souvent encouragé pour garantir que les terres et les titres n’échappent pas à la famille.
Procédures
- Les mariages entre cousins germains ont souvent nécessité une bénédiction ecclésiastique, bien que cela dépendait largement des lois locales.
- Des études généalogiques étaient réalisées pour éviter des mariages trop proches.
Lois et régulations sur la consanguinité à l'Époque Moderne
- Église catholique et droit canonique : L’Église catholique, très influente à cette époque, interdisait les mariages entre parents proches jusqu’au quatrième degré de parenté (cousins germains). Cependant, les familles nobles pouvaient obtenir des dispenses papales pour se marier malgré ces interdictions, notamment pour des raisons dynastiques ou politiques.
Source : Droit canonique médiéval et moderne.
Anecdote : Mariage royal consanguin célèbre : Philippe II d'Espagne et Anne d'Autriche (1570)
Philippe II, roi d'Espagne, épousa Anne d'Autriche, sa nièce, renforçant ainsi les liens entre les branches espagnole et autrichienne des Habsbourg. Ce mariage illustre la politique matrimoniale de la dynastie Habsbourg, souvent marquée par des unions consanguines pour maintenir le contrôle sur leurs territoires européens.
Source : Kamen, H. (1997). "Philip of Spain".
Début de l'Époque Contemporaine (fin XVIIIe - XIXe siècle)

Révolution française et réformes légales (1789 - 1804)
Avec la Révolution française et la chute de l'Ancien Régime, les structures sociales et juridiques de la France furent profondément modifiées.
Le Code civil napoléonien (1804), aussi appelé Code Napoléon, codifia les relations familiales et aborda les questions de mariage.
Code Napoléon (1804)
Bien qu’il réglemente les mariages, le Code Napoléon autorise le mariage entre cousins germains, tout en interdisant les unions entre frères et sœurs, oncles et nièces, etc.
Source : Code civil des Français (1804).
Loi sur la consanguinité en France à la fin du XIXe siècle
En France, les restrictions légales concernant les mariages consanguins sont largement inspirées du Code Napoléon. Bien que des interdictions existent pour des unions proches, les dispenses restent possibles dans certaines situations.
Source : Législation du mariage en France sous le Code civil.
Anecdote : Le roi Ferdinand VII d’Espagne et Marie-Christine de Bourbon-Siciles (1829)
Ferdinand VII épousa sa nièce, Marie-Christine de Bourbon-Siciles, en 1829.
Ce mariage consanguin entre membres de la même famille royale renforçait une longue tradition de la noblesse espagnole.
Source : Alvarez, F. (1977). "Los Borbones en España".
Anecdote :Napoléon Bonaparte et Marie-Louise d’Autriche (1810)
Bien que ce mariage ne soit pas directement consanguin, il est représentatif des alliances royales européennes du début du XIXe siècle. Napoléon, empereur français, épousa Marie-Louise, fille de l’empereur d’Autriche, pour renforcer ses liens politiques avec la maison des Habsbourg, qui elle-même avait un lourd héritage de mariages consanguins.
Source : Gallo, M. (1997). "Napoleon: His Wives and Women".
NB. La différence entre cousins et cousins germains repose sur le degré de parenté.
- Les cousins germains sont les enfants de frères et sœurs. Autrement dit, ils partagent des grands-parents communs.
Les cousins germains sont donc des parents de 2e degré (en droit Canon, voir plus bas), après les parents et frères/sœurs qui sont des parents de 1er degré.
- Le terme cousins, de manière générale, inclut non seulement les cousins germains, mais aussi les autres types de cousins qui peuvent être plus éloignés en parenté.
Cousins plus éloignés : Au fur et à mesure que l’on s’éloigne en génération, on peut parler de cousins au 3e, 4e degré, etc., ce qui signifie qu’ils partagent des ancêtres communs plus éloignés (par exemple des arrière-arrière-grands-parents communs).
Fin du XIXe et début du XXe siècle (1870 - 1945)

Contexte des mariages consanguins dans la société aristocratique et bourgeoise
Vers la fin du XIXe siècle, les mariages consanguins, bien que moins courants dans les sociétés bourgeoises naissantes, restaient fréquents au sein des familles royales et aristocratiques européennes. La consanguinité visait encore à maintenir des alliances et à protéger les patrimoines familiaux
Lois régulant la consanguinité à la fin du XIXe siècle
En France, les lois sur la consanguinité n’ont pas évolué de manière significative depuis le Code Napoléon.
Cependant, à l’échelle européenne, de plus en plus de pays mettent en place des restrictions plus strictes contre les mariages entre proches parents, en partie en raison des nouvelles découvertes médicales sur les risques génétiques associés.
Anecdote : Mariage consanguin célèbre : Victoria de Saxe-Cobourg-Gotha et le prince Albert (1840)
La célèbre reine Victoria du Royaume-Uni et son mari, le prince Albert, étaient cousins germains. Leur union illustre l'importance des alliances matrimoniales dans les monarchies européennes, où de nombreux souverains partageaient des ancêtres communs.
Source : Hibbert, C. (2000). "Queen Victoria: A Personal History"
Époque contemporaine (XXe siècle - aujourd'hui)

Évolution des perceptions scientifiques et sociales des mariages consanguins
Au XXe siècle, la génétique commence à jouer un rôle majeur dans la compréhension des risques associés aux mariages consanguins.
Les découvertes sur les maladies génétiques récessives font évoluer la perception de la consanguinité, la rendant moins acceptable dans la société moderne.
Législations modernes
Au XXe siècle, la plupart des pays européens adoptent des lois plus strictes contre les mariages consanguins, souvent inspirées par les risques sanitaires. En France, bien que le mariage entre cousins germains soit toujours légal, la société et les médecins avertissent des dangers potentiels.
Lois actuelles sur la consanguinité
Dans de nombreux pays, y compris en France, la législation sur la consanguinité est aujourd'hui très restrictive. Les mariages entre frères et sœurs, oncles et nièces ou cousins très proches sont interdits. Cependant, les mariages entre cousins germains restent autorisés, bien que leur acceptation sociale varie.
Anecdote : Mariage royal consanguin : Alfonso XIII d'Espagne et Victoria Eugenie de Battenberg (1906)
Le roi Alfonso XIII d’Espagne épousa Victoria Eugenie de Battenberg, sa cousine au second degré. Leur descendance fut marquée par l'hémophilie, une maladie héréditaire transmise par Victoria, un rappel des risques liés aux mariages consanguins dans les familles royales.
Source : Hoare, P. (1997). "The Royal Houses of Europe".
La Consanguinité en 2024

Pratiques et Législations
En 2024, les lois concernant la consanguinité varient considérablement d'un pays à l'autre.
Dans de nombreux pays européens, les mariages entre cousins germains sont autorisés, tandis que les unions entre plus proches parents (comme les frères et sœurs) restent interdites.
Dans certains pays, comme l'Arabie Saoudite et d'autres pays du Moyen-Orient, le mariage entre cousins est socialement accepté et même encouragé.
Problèmes de Santé
- La recherche médicale moderne souligne les risques génétiques associés à la consanguinité, tels que des maladies héréditaires et des malformations congénitales.
- En cas de doutes, de nombreux couples choisissent de passer des tests génétiques avant de se marier pour évaluer les risques.
Procédures Actuelles
- Les couples qui souhaitent se marier peuvent avoir besoin de prouver leur non-parenté, surtout dans les pays où les lois sur la consanguinité sont strictes.
- Des consultations génétiques sont de plus en plus courantes pour les couples ayant des antécédents familiaux de maladies héréditaires.
Évolution de la Perception
- La perception de la consanguinité a évolué, avec une sensibilisation accrue aux questions de santé et d'éthique. Cela a conduit à un débat sur la légitimité des mariages entre cousins germains, notamment en ce qui concerne la santé des descendants.
Les degrés de parenté
Le degré de parenté représente le nombre de générations existant entre un individu et les membres de sa famille.
Il existe deux méthodes de calcul de degré de parenté :
selon le droit civil ou selon le droit canon.
(bon courage...)

Droit civil
Le droit civil est le droit commun d'une nation, applicable à tous ses citoyens. Il comprend les matières du droit des personnes, de la propriété et des obligations, et se base sur le Code civil français.
Selon le droit civil français : "La proximité de parenté s'établit par le nombre de générations ; chaque génération s'appelle un degré."
Ainsi, selon le droit civil français, sont parents :
- au premier degré : les enfants de l'individu, et ses père et mère.
- au deuxième degré : ses petit-enfants et ses grand-parents. Les frères et sœurs de l'individu sont aussi parents à ce même degré.
- au troisième degré : les arrière-grands-parents de l'individu, ses oncles et tantes et ses neveux et nièces.
- au quatrième degré : les cousins et cousines germains de l'individu.
En droit civil, le degré de parenté constate le nombre d'intermédiaires séparant deux personnes en remontant à l'ancêtre commun puis en redescendant jusqu'à l'autre.
Droit canon
Le droit canon (ou canonique) est l’ensemble des lois et des règlements adoptés ou acceptés par les autorités catholiques pour le gouvernement de l’église et de ses fidèles.
Le droit canonique fixe les droits et les obligations de tous les fidèles
Le droit canon considère séparément le nombre de degrés séparant chaque individu de l’ancêtre commun, ce qui implique un résultat différent et plus détaillé du nombre de degrés que dans le droit civil.
Ainsi selon le droit canon, le degré de parenté s'exprime
En une seule donnée si les personnes intéressées appartiennent à la même génération (ex. "lié au quatrième degré"). Ainsi :
- frères et sœurs sont liés au 1er degré.
- cousins et cousines germains sont liés au 2e degré.
- cousins et cousines issus de germain sont liés au 3e degré.
En deux données s'ils appartiennent à des générations différentes (ex. "sont parents du trois au quatre"). Ainsi :
- un oncle et sa nièce sont parents du 1er au 2e degré,
- un petit-neveu et sa grand-tante sont parents du 1er au 3e degré,
- un individu est parent du 2e au 3e degré avec la fille de son cousin germain.
Dans les deux cas, ces données expriment alors le nombre de générations qui séparent chaque personne prise en compte de l'ancêtre commun.
CONCLUSION
Les mariages consanguins ont traversé les siècles en Europe, souvent encouragés pour des raisons politiques ou économiques, notamment dans les familles royales. À l'Époque Moderne, ces mariages étaient courants et régulés par des lois religieuses, tandis qu'à partir du XIXe siècle, les codes civils comme le Code Napoléon ont fixé des cadres légaux plus précis.
L’évolution des connaissances médicales au XXe siècle a progressivement fait reculer la pratique des mariages consanguins, à mesure que les risques génétiques devenaient mieux compris.
Aujourd'hui, bien que la loi permette encore certains mariages entre cousins, ces unions sont moins fréquentes et souvent perçues avec plus de méfiance.
Généalogie et consanguinité
En généalogie, les mariages consanguins ont un impact sur le nombre d'ancêtres "différents" que l'on s'attend à retrouver dans un arbre généalogique.
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